Cela existe certainement depuis très longtemps mais j’ai remarqué dernièrement des collaborations entre tatoueurs qui me semblent vraiment inspirantes. C’est fascinant de voir deux talents s’entremêler au service d’un projet, d’une peau. Chacun apporte son tracé et son univers pour croiser et fusionner en une création unique.
J’imagine que cela doit être enrichissant pour un artiste de collaborer de la sorte. C’est l’occasion de sortir de sa zone de confort, de se challenger, de se mettre une pression positive pour donner le meilleur de soi-même et ne pas décevoir l’autre.
Du côté du client, cela permet de faire cohabiter deux artistes au sein du même tatouage, dans une cohérence globale, et non les uns à côté des autres comme on le fait le plus souvent. C’est une opportunité de faire cogiter deux tatoueurs sur un projet personnel sur lequel ils apportent chacun leur sensibilité, souvent différente et donc complémentaire.
Cela m’intrigue de savoir comment prennent forme ces collaborations. Sont-elles dues à une amitié ? Une admiration réciproque ? Une simple opportunité qui se présente ?
Voici quelques exemples de ces collaborations entre artistes tatoueurs. N’hésitez pas à me dire ce que vous en pensez ! Seriez-vous intéressé(e)s par une démarche similaire ? Est-ce que cela pourrait faire partie de votre collection de tatouages ?
Nag vs Gumo
C’est la rencontre entre le style graphique et cubique d’Ugly Kid Gumo et la touche plus sombre et détaillée de Nag Morgane. Ces deux-là ont même créé une page Facebook dédiée à leur collaboration.
J’en ai profité pour leur poser quelques questions :
Comment vous est venue l’idée d’une collaboration, de croiser vos univers ?
NAG : L’idée vient de Gumo au départ, nous nous sommes rencontrés pour un échange de tatouage, le feeling est super bien passé, la collab à 4 mains a suivi quelques mois plus tard. Nos deux univers très différents fonctionnent bien ensemble, le côté minimaliste épuré et déstructuré pour Gumo et le côté noir & gris plus travaillé pour moi.
GUMO : Ouais, c’est surtout une histoire de feeling, car tu peux faire des collabs avec beaucoup d’artistes, graphiquement ça peut fonctionner, mais si y a pas ce petit truc en plus, c’est comme un truc sans âme. A plein de niveaux, on est très différents, rien que dans nos parcours. Nag, elle a fait un apprentissage traditionnel alors que moi j’en ai pas fait, on a dix piges d’écart, on a des rigueurs et des sensibilités différentes, on n’a pas les mêmes références ni même la même vision du tatouage. Mais c’est ce qui m’intéresse dans le fait de travailler avec elle, et je pense que les clients le vivent et le partagent aussi avec nous, ce qui en fait un Moment plus qu’un simple tatouage. Pendant la séance, on se charrie, on s’embrouille, on se conseille, on s’arrange, on interpelle le client, on lui demande son avis, ça rend tout ça vivant.
Qu’est-ce que cela vous apporte ?
NAG : Pour moi qui bosse toute seule dans mon coin en Picardie, ça me permet d’échanger régulièrement avec quelqu’un (j’ai un problème avec la solitude je crois !). Au delà de l’échange humain, il y aussi l’aspect technique, et c’est enrichissant de pouvoir travailler à deux sur un même projet !
GUMO : Il y a de ça, moi j’ai besoin d’être seul mais aussi de me confronter aux autres, à l’autre, d’avoir un challenge, de repousser le truc, même si c’est anodin, ça me vient sûrement du graffiti, quand on se propose une idée, j’aime ce moment où tu te poses en te demandant comment tu vas prendre ce truc, par quel bout, comment ne pas retomber dans ce qu’on a déjà fait, comment expérimenter, comment repousser la confrontation graphique plus loin.
Comment fonctionnez-vous pour créer ensemble un tatouage à 4 mains ?
NAG : Au début, on en a dessiné quelques uns en décidant vraiment à l’avance de ce qu’on allait faire, des fois ça fonctionnait et d’autres non. Aujourd’hui, on travaille plus à distance en mixant des dessins qu’on a déjà réalisés et en les mixant de la meilleure manière possible. Durant le tatouage, c’est chacun notre tour, d’abord les tracés de Gumo, puis les miens, et ensuite les détails, on échange nos places 3 ou 4 fois durant une séance. En dehors des flashs que l’on propose régulièrement, on réalise également des projets personnels pour des clients qui aiment nos boulots respectifs, c’est encourageant.
GUMO : Comme le dit Nag, pour le moment on est plus dans une alternance, on est assez réglementés par notre « technique », mais j’aimerais vraiment qu’on travaille sur des projets plus grands nous offrant cette possibilité de travailler en même temps, de croiser les traits, de superposer des lignes. Comme ça j’ai conscience que ce n’est ni de la toile ni du mur, la peau a sa propre lecture et on se doit de la respecter et de respecter le client, je n’aime pas imposer une souffrance inutile si je le peux, mais je crois qu’il y a possibilité de trouver un équilibre entre les deux. Et pour les dessins, parfois les idées viennent d’elle, parfois je vois un flash qu’elle poste et j’ai envie de m’y attaquer, comme elle le soulignait, ça passe ou pas, mais c’est ce qui est enrichissant dans une collaboration
Léa Nahon vs Köfi
J’adore aussi cette collaboration qui fusionne le trait brut et épuré de Léa Nahon, qui tatoue souvent des visages ou des corps, et le trait plus graphique et désordonné de Köfi qui ajoute une réelle atmosphère à l’ensemble.
Caroline Karénine vs San
Ce magnifique dos à 4 mains allie la finesse du trait de Caroline Karénine et de ses majestueuses femmes du monde, avec le style plus sombre et dépouillé de San.
Emilie B vs Guillaume Smash
L’association des styles pop-art aquarelle d’Emilie B et de Guillaume Smash rendent ces tatouages uniques en couleurs et textures, une belle harmonie !
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3 réflexions sur “Les collaborations entre tatoueurs”