Me revoici dans cette nouvelle rubrique, après l’interview de Beccy Rimmer d’Inkluded, j’ai la joie de vous présenter le photographe Samten Norbu. Je l’ai découvert lors de la préparation de mon article sur la tatoueuse Morgane de Sour & Sweet, sa photo des filles prenant le thé dans un environnement très cosy girly m’avait beaucoup plu.

Je ne suis pas une experte en photographie, je ne connais pas le vocabulaire adapté, je suis juste une spectatrice qui voit cela avec un œil naïf, juste ce qu’il faut pour ressentir, ou pas, des émotions. Et il me semble bien que c’est le but des photographes, de faire passer des messages ou des émotions.
Ce qui me plaît dans les photos de Samten, ce sont les mises en scène dingues ! C’est un vrai travail d’orfèvre de créer un décor, une ambiance si particulière, notamment sur la série avec Morgane de Sour & Sweet et celle avec Sacha Lehne. Ensuite, j’adore l’atmosphère métallique qui se dégage des photos. Cette lumière diffuse et contrastée donne un aspect très mystérieux, voire inquiétant. Ces compositions oniriques nous font voyager dans un temps qui n’existe pas, qui peut être malfaisant ou bienveillant à la fois.


Bonjour Samten, peux-tu te présenter ?
Bonjour Stef, j’ai un parcours qui peut sembler un peu erratique car je suis passé par plusieurs gros changements dans ma vie. Après des études de com, j’ai vite compris que ce milieu ne me convenait pas. J’ai tout lâché à l’époque pour faire de la musique pendant quelques années. Et c’est il y a un peu plus de 13 ans que la photo est devenue une évidence comme mode d’expression. Je me suis professionnalisé il y a pile poil 10 ans.
Et au cœur de la photo, mes pistes de recherche sont en constante évolution. Entre les différents thèmes et la manière de les aborder. Pour moi, c’est un immense terrain de jeu que j’explore. Ça se passe aussi bien au niveau du rendu que de l’approche.
Pourquoi aimes-tu photographier des modèles tatoués ?
En vrai, je t’avoue que ce n’est pas forcément mon premier critère, c’est même aujourd’hui devenu très compliqué de trouver des modèles qui ne le sont pas !
Ma recherche est plus liée aux thèmes et scénographies que je souhaite réaliser, ainsi qu’aux rencontres que je fais. Il y a quelques années, j’ai rencontré une modèle avec qui un thème s’était dessiné pour créer une ambiance un peu déglinguée dans un salon de tatouage. Après quelques semaines, j’ai fait la rencontre de Sacha Lehne qui avait son atelier à Strasbourg et on a pu réaliser cette série. C’était la première série réellement orientée tattoo. Par la suite, j’ai rencontré pas mal de modèles du milieu pin-up/burlesque de ma région et du coup j’ai fait quelques séances autour de ça.
Il y a des personnes avec qui il y a des idées qui se réalisent très rapidement, d’autres qui traînent, comme par exemple la série avec Morgane dont tu as parlé sur ton blog il y a peu, c’est une série qu’on avait sous le coude depuis des siècles et qui a enfin pu se faire il y a quelques mois !
Comment mets-tu en valeur précisément ces peaux encrées ?
C’est très variable, ça dépend de ce que le tatouage véhicule. Comme je te le disais, beaucoup de modèles sont tatouées, du coup il y a un peu de tout. Certaines fois, je suis tenté d’effacer numériquement certains tatouages car ils n’apportent rien à mes mises en scènes par rapport à la présence de la modèle, et d’autres fois, ils sont la pièce maitresse de la photo.

Comment travailles-tu tes mises en scène ?
Il y a tout un travail préparatoire qui est certainement la partie la plus longue et compliquée car pour exister, mes mises en scène ont besoin d’un « théâtre », un lieu qui possède déjà en lui même une âme, un cadre qui permettra de propulser le reste de l’histoire que je vais écrire avec la modèle. Il me faut parfois des mois avant de trouver un lieu qui me parle, et d’ailleurs c’est de plus en plus long et compliqué. Il y a encore quelques années, je me penchais un peu du côté de l’urbex (exploration urbaine de lieux abandonnés) pour trouver des « spots », mais c’est une communauté fermée et méfiante qui n’aime pas trop partager, et puis les lieux qui tournent sont en général déjà vu, revus et re-revus. Du coup, je n’y prends pas le même plaisir. J’aime apporter quelque chose d’un peu secret, magique.
Es-tu tatoué ? Combien en as-tu ?
J’ai un tatouage … dans ma tête ! Comment expliquer ça … J’ai toujours considéré qu’un tatouage n’était pas un truc à prendre à la légère. J’ai vu trop de gens qui vont se faire tatouer comme on va pisser, surtout en ayant vécu en Thaïlande où je voyais des gars bourrés aller se faire tatouer des trucs immondes et se réveiller avec la gueule de bois et un truc ignoble à vie sur leur peau !
Du coup, ça fait des années que j’ai une idée assez précise de deux ou trois idées qui auraient leur place, mais à force de tergiverser, c’est resté au stade de l’idée.
Ah si, en fait j’ai quand même UN tatouage. A l’écore primaire, une fille m’avait planté son stylo à plume dans le doigt et j’ai gardé la trace !
Quelle est ta propre relation au tatouage ?
Comme je l’ai dit, par rapport à mon métier, c’est devenu compliqué de trouver des modèles qui ne soient pas tatouées (surtout dans les milieux un peu alternatifs où je peux trouver des gens assez barrés pour me suivre dans mes univers). Du coup, j’ai un regard assez critique sur le phénomène parce que pas mal de fois je suis tombé sur des modèles qui avait sur la peau des trucs qui franchement n’apportaient rien ! Les beaux tatouages sont finalement assez rares ! Par contre, quand on tombe sur eux, on est face parfois à des vraies œuvres d’art, des trucs qui subliment la peau et véhiculent un truc. C’est un rapport ambigu qui varie en fonction des choses que je vois. D’une certaine manière, la démocratisation à outrance du phénomène a aussi permis l’émergence de talents et je porte mon attention sur les belles choses.
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Une réflexion sur “Rencontre avec le photographe Samten Norbu”