(2016, MTV) — 1 saison, 10 épisodes (drame, comédie)
Malgré la quantité de séries déjà suivies, je me laisse de temps en temps tenter par un pilote. Pourquoi ai-je choisi de regarder celui de Sweet/Vicious ? Aucune idée, mais tant mieux, car c’est un gros coup de cœur !
Synopsis :
Durant la journée, Jules est la parfaite étudiante américaine. Elle fait même partie d’une des confréries de son université. Mais cette dernière garde un lourd secret : elle a été victime d’un viol commis sur le campus. Bien décidée à faire payer le responsable et à empêcher que cela ne se reproduise, Jules décide de faire justice, elle-même, la nuit. Aidée par Ophelia, une étudiante en droit, hacker et dealer, elle part en quête de vengeance… (source : Allocine)
Mon avis
Batman au féminin
Les héroïnes de Sweet/Vicious n’ont pas de supers pouvoirs. Elles s’entraînent dur pour être capables de casser la gueule aux violeurs. Et comme Batman aussi, elles ne sortent d’ailleurs pas toujours indemnes de leurs périples nocturnes, tant sur le plan émotionnel que physique.
Pas de supers pouvoirs donc, mais des ressources : intelligence, argent, talent, détermination, force et volonté. Face à une situation d’injustice (ici, l’inaction des autorités face aux accusations de violences sexuelles), elles tentent de rétablir la balance, un semblant d’équilibre et mettent leur ressources au service de leur cause.
Ophelia: So what do we do next?
Jules: There is no ‘we.’ I work alone.
Ophelia: First off, that is something Batman so would have said, and secondly, that sure worked well for you tonight.
Jules: I would have been fine.
Ophelia: No, you would have been dead.
Jules: What? You want me to teach you everything I know? You want to be my Robin.
Ophelia: I wouldn’t be Robin. Robin’s a bitch.
Un sujet lourd, traité avec humour
Malgré le sérieux du sujet, et sûrement même à cause de cela, les dialogues sont souvent teintés d’humour, certes un peu noir et décalé, en plus d’être bien écrits.
Je ne m’attendais pas à rire en regardant une série sur le viol et c’est une bonne surprise ! Le comique s’appuie aussi sur des situations et détails cocasses (Ophelia qui vomit rose !) et sur l’apparente différence entre les deux héroïnes.
Jules [showing her phone screen]: Do you know this girl? DO YOU KNOW THIS GIRL?!
Will: It’s your lock screen!
Jules: Oh. It is? Dang it.
Justesse du traitement et des personnages
Si vous avez déjà lu plusieurs de mes articles, vous avez peut-être remarqué que je suis sensible à la justesse dans le traitement d’un sujet et à la complexité des personnages. Sweet/Vicious a su trouver le bon ton et écrire des personnages qui ont du relief : on dénonce sans diaboliser les agresseurs ou juger les victimes, on est féministe sans être misandre. On colle au plus près de la réalité de ce que vivent les victimes et de ces situations difficiles.
La créatrice de Sweet/Vicious, Jennifer Kaytin Robinson explique dans une interview :
« […] quand tu racontes cette histoire, tu ne racontes pas seulement une histoire de super héros fantastiques – tu abordes une problématique qui mérite d’être traitée correctement ; nous avons senti cette pression et je voulais faire une série dont nous pourrions tous être fiers et j’ai l’impression que c’est le cas. J’en suis très fière. »
Catharsis
Enfin, je dois avouer que le tabassage de prédateurs sexuels par Jules et Ophelia est kiffant. Quelle femme n’a pas rêvé de faire de même ! À travers elles, on se venge un peu de tout ces types, de toutes ces fois où on n’a pas osé, rien dit, laissé faire par peur.
« Sweet/Vicious a le mérite de traiter de la culture du viol comme jamais auparavant la télévision ne l’avait fait. Et quelle meilleure plateforme pour le faire que la chaîne MTV, qui s’adresse directement aux jeunes ? » écrit Delpine Rivet, journaliste séries, dans un très bon article publié sur Biiinge. Ce fléau touche 23% des étudiantes sur les campus américains, « Et Sweet/Vicious parvient, en à peine dix épisodes, à traverser tout le spectre de ces discriminations sexistes. Il y a tant à dire sur la culture du viol, et la série ne nous épargne rien et ne prend aucun détour. Elle remue et bouscule sans conteste nos convictions les plus intimes. » continue Delphine Rivet pour qui Sweet/Vicious est « une série d’utilité publique ».
Fortes et fragiles à la foi, humaines et surhumaines, Sweet/Vicious a créé des héroïnes qui nous ressemblent. Pour une fois à la télévision, le viol n’est pas un simple élément dramatique au service de l’intrigue, il en est le sujet principal. Sweet/Vicious offre à la fois un bon moment de télévision et fait de la prévention, libère la parole sur un sujet encore trop souvent tabou.
Pour un avant goût, voici les 10 premières minutes du 1er épisode :